Plat emblématique de l’ancienne capitale impériale, Bun Bo Hue a gardé au fil du temps la quintessence d’une cuisine d’exception, raffinée et un peu à part dans le paysage gastronomique du Vietnam.
Considéré comme “l’une des meilleures soupes du monde” par le célèbre chef Anthony Bourdain, le Bun bo Hue - soupe de nouilles de riz épicées au bœuf - est un plat populaire d’origine royale.Dans les temps anciens (probablement courant du 16ème siècle), une certaine Ba Bun - Madame vermicelle - habitait un petit village dans la campagne de Hue. Cette brave femme avait l’excentricité de vivre de la fabrication de nouilles de riz, au lieu d’avoir le dos courbé dans les rizières, comme les autres femmes du village. On dit qu’elle était très belle et que tout le village l’adorait. Or il advint que ce village connut 3 années consécutives de sécheresse. Il n’y avait qu’une seule explication à ce terrible malheur : l’activité de Dame Bun ! Faire des nouilles au lieu de repiquer le riz, voilà qui avait certainement provoqué l’ire des dieux ! Ce qu’il faut savoir pour comprendre la colère des villageois, c’est que pour fabriquer des nouilles de riz, il faut moudre les grains. Or, le riz étant considéré comme cadeau du Ciel pour que les humains ne meurent pas de faim, le réduirai en poudre ne pouvait qu’être une offense aux dieux… Ba Bun fut chassée hors de son village. Après un temps d’errance à tenter de trouver où s’installer pour continuer sa production de nouilles de riz, Ba Bun fit halte au village de Van Cu, petit hameau paisible et coquet, sur les rives de la rivière Bo. Il n’était distant de Hue que d’une dizaine de kilomètres. Elle n’eut de cesse de fabriquer des nouilles de riz, transmettant sa passion et son savoir-faire aux jeunes du village de Van Cu. C’est depuis lors que ce village est considéré comme le berceau des premières et savoureuses nouilles de riz de Hue.Alors que les peuples du Nord suivaient leur empereur dans le Sud, ils s’arrêtèrent au pied des tours Cham du Centre du Vietnam. Ils avaient pour habitude manger le riz sous forme naturelle, mais en découvrant les nouilles de riz du village de Van Cu, l’histoire nous rapporte qu’ils ajoutèrent au bouillon du bœuf sauté et des épices, donnant ainsi naissance à un plat tout simple, mais délicieusement parfumé : Bun Bo Hue – Bún, les vermicelles et Bò, le bœuf.
On ne sait pas exactement quand et comment ce simple plat de nouilles s’est complexifié et s’est raffiné pour devenir un plat servi à la table des Nguyen – cette dynastie établie à Hue et qui a régné sur le Vietnam de 1802 à 1945. Du jarret porc est venu tenir compagnie au bœuf, sans qu’on sache exactement quand, puis les « cha » ou « gio », ces pâtés typiquement vietnamiens, très courants sur les tables du Pays, ont eux aussi rejoint la recette de base. Les modes et l’imagination des uns et des autres a dû faire le reste pour donner aujourd’hui un plat à la fois très complexe, et d’une parfaite simplicité dans l’équilibre des saveurs : épicé, acide, salé et sucré.
Attention à ne pas confondre avec Bo Bun ! Originaire du Sud, il s’agit ici de vermicelles servis à température ambiante, avec de la viande chaude et garnie de salade arrosée de nuoc mam et de cacahuètes pilées. En France, on trouve parfois ce plat avec des nems dedans. Ce qui n’existe pas au Vietnam, originellement en tout cas : il y a une différence entre bún bò, et bún nem. Dans le Nord du Vietnam, ce Bo bun prend le nom de Bun Bo Nam Bo, ce qui peut peut-être expliquer la confusion chez les gens.
Si ce plat originaire de Hue a aussi bien conquis Hanoi que Saigon, Paris que New York, sa signature est unique : il faut d’abord et avant tout des vermicelles de Hue, idéalement du village de Van Cu (pour les raisons historiques dont on a parlé). Ensuite, le bouillon, au gout caractéristique d’os et de queue de bœuf mijotés pendant des heures. Le bouillon, c’est l’âme du Bun Bo Hue, avec la saveur du filet et du jarret de bœuf bien entendu, mais s’y ajoute aussi le pied de porc qui va mettre son empreinte à la saveur addictive – parfois remplacé par du jambonneau. La pâte de crevette arrive ensuite avec ses tonalités salées et épicées, des tonalités qui seront adoucies par la citronnelle, discrète mais si présente à la fois, filigrane d’un authentique Bun Bo Hue. La gourmandise y ajoutera des cubes de sang coagulé, des boulettes de crabe, du pâté « gio »… La simplicité originelle était dans les herbes présentes dans le bouillon. De nos jours, pousses de haricot mungo, fleurs de bananier et herbes aromatiques entrent dans cette danse devenue complexe. Et enfin, un plat de Hue ne serait pas abouti s’il n’était pas agréable à l’œil comme il l’est pour les papilles et le nez. Bun Bo Hue se présente dans un rouge chaud et épicé, il y a le reflet pâle des vermicelles, le rose soutenu ou très fonce de la viande, le vert de la coriandre et du basilic, et encore le rouge du piment…
Petit miracle culinaire, il est dit que la saveur du Bun Bo Hue est aussi forte que les liens qui unissent les Vietnamiens. Lors de votre prochain voyage au Vietnam, laissez le miracle s’accomplir…
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