Découvrir les Hauts-Plateaux du Centre-Vietnam, c'est se plonger dans une nature sauvage et sereine et c'est aussi – surtout ? – rencontrer des communautés locales peu connues, au coutumes uniques et complexes.
Les hauts plateaux du Centre du Vietnam comprennent les provinces de Kon Tum, Gia Lai, Dak Lak, Dak Nông et Lâm Dông. Moins sous les feux des projecteurs que le Nord-Vietnam, cette région accueille pourtant de nombreuses minorités ethniques dont les JaRai, les Bahnar et les Êdê.
Le Tay Nguyen forme une frontière naturelle avec une partie du Cambodge et du Laos et s'ouvre sur l'étroite bande de terre du Centre Vietnam jusqu’à Danang à l'est et Da Lat au sud. Région à part depuis toujours, elle est le berceau de peuples anciens, surnommes "Les Montagnards", détenteurs de coutumes et de savoirs immémoriaux fièrement et farouchement préservés. Les JaRai habitent essentiellement les Provinces de Gia Lai et de Kon Tum. Ils ont quelques représentants dans le Dak Lak et sont également présents au Cambodge.
Si On pense que les Jarai ont quitté les plaines côtières il y a environ 2000 ans pour s'installer sur le plateau fertile autour de Plei Ku, dans la province de Kon Tum, on n'a aucun document ancien permettant de connaitre les origines, les migrations, les évolutions de cette communauté comptant aujourd'hui environ 250 000 âmes. Les premiers textes connus datent du 19eme siècle de l'ère commune et proviennent de la colonie française installée là, entre Ratanakiri et Tay Nguyen. Les rares études faites sur cette communauté locale, on les doit aux missionnaires qui ont tenté de mieux connaitre ce peuple (pour mieux l'évangéliser cela va de soi). L'étude de leur langue, engagée à partir du milieu du 19eme, permet de dire que la langue Ja Rai est liée d'une part à la langue Cham de l'ancien royaume de Champa, aujourd'hui le Centre-Vietnam (l'ancien Annam, en fait) et d'autre part aux langues malayo-polynésiennes d'Indonésie, de Malaisie, de Madagascar et des Philippines. Ce groupe Malayo-polynésien comprend 6 sous-groupes : Chor, Herung, Hbau, Arap, Mthur et To buan. Le groupe Jarai khmer se trouvant au Cambodge.
Leur premier contact avec l'Occident a été en 1850, avec leur rencontre d'un missionnaire français qui s'aventurait sur le Mékong. En 1893, la région est absorbée par l'Indochine française et les populations utilisées massivement dans les immenses plantations d'hévéas. Ils ont également fait partie des avant-postes de l'armée coloniale.
Après l'indépendance, les autorités vietnamiennes ont fait campagne pour assimiler les ethnies locales dans la société nationale, mais en vain : elle se sont heurtées à une résistance culturelle de la plupart des communautés. La région a profondément et meurtrie pendant la guerre contre les américains, les armées US distribuant aussi bien les bombes que les Bibles. De nombreux villages se sont alors vidés de ce qui restait comme occupants, pour émigrer au Cambodge ou même aux USA. Puis les JaRai ont cherché l'indépendance grâce à la tentative ratée du mouvement Degar.
La population doit aujourd'hui faire face à la déforestation et l'accaparement des terres par le Cambodge. Même si officiellement le Royaume a des lois très claires à ce sujet, la corruption fait toujours des ravages. Pauvres et à l'écart du monde, les JaRai – même aujourd'hui protestants à 60% - demeurent dans leurs traditions millénaires, comme un défi et une revendication.
La famille Jarai est matrilinéaire, c'est-à-dire que la transmission, par héritage, du prestige et des biens matériels, des noms de famille et titres se succède suivant le lignage féminin.
Les villages Jarai sont disposés en carré. Tout est organisé autour du centre du village qui est marqué par la maison communale (nha rong, centre communautaire où se rencontrent conseil des anciens et chef de village), un puits, des filets de volley-ball et un moulin à riz. Les villages Jarai portent le nom des rivières ou des chefs de village voisins. Les maisons sur pilotis étaient autrefois en bambou mais plus récemment en bois avec des toits en zinc – plus résistants aux aléas de la météo, tout en conservant cependant les proportions d’origine. Un village peut avoir une trentaine de maisons longues édifiées sur un modèle rappelant les habitations de leurs ancêtres insulaires, avec une ouverture principale donnant sur le Nord. Deux escaliers sculptés et installés côte-à-côte permettent l’accès. L’un est affublé d’attributs féminins. Il est réservé aux femmes enceintes et aux invités, tandis que son voisin sert l’usage domestique de la maison. Le cimetière occupe une place importante dans la vie spirituelle locale, notamment pour la cérémonie de l’abandon de la tombe des ancêtres, qui marque la fin du deuil (qui peut durer des années).
Les JaRai gagnent leur vie en cultivant du maïs et du riz sur brulis. Ils possèdent également chevaux et des éléphants.
Le costume traditionnel des Jarai se compose pour les hommes d'un langouti (long pagne) blanc aux rayures colorées au quotidien et de couleur indigo des motifs blancs et rouges pour les jours de fête. Les femmes portent le pagne indigo et une veste courte dont l’ourlet du bas est ornes de motifs géométriques.
Ils ont conservé de nombreux artisanats traditionnels, tels que le tissage de brocart (selon une méthode qui leur est propre), la fabrication d'instruments de musique et de nattes en feuilles d'ananas. Les JaRai ont une très grande sensibilité musicale. Ils sont passés maitres dans l'art de jouer du gong ou du xylophone. Les JaRai sont les seuls à jouer du k’longput, un assemblage de tubes de bambou dans lesquels les joueurs forcent l’air en frappant des mains. La musique est un lien de cohésion sociale et communautaire. Quand le musicien improvise le Jarai Trova (conte musical sur les défis de la vie quotidienne), c'est le moment où les enfants apprennent les histoires anciennes de leur peuple et les valeurs ancestrales de la culture Jarai. C'est aussi (pour les adultes…) le moment de boire le Srah Phien liqueur à base de riz fermenté.
Il n'est pas de fête qui ne soit marquée de la trinité gongs – danse – alcool (bu au chalumeau de paille). Considérés comme l’âme de toute cérémonie, les gongs servent de langage commun entre les divinités, le monde et l'homme. Cette place particulière du gong dans la vie spirituelle des JaRai – appelée espace de culture de gongs - a été reconnue en 2005 comme Patrimoine immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
La plupart des JaRai sont animistes et rendent hommage à leurs ancêtres et à la nature à travers une foule de génies (yang). L'animisme Jarai comporte deux éléments fondamentaux : la croyance que le peuple Jarai a reçu l'épée sacrée du ciel (Symbole de la sagesse) et les figures mystiques du Roi de Feu, Roi de l'eau et du roi du Vent, en tant que chefs spirituels du peuple Jarai. Viscéralement lié à la jungle et ses esprits, l'animisme Jarai comprend aussi des sacrifices animaux pour apaiser les esprits. Le christianisme a peut-être réussi à pénétrer dans les croyances populaires pour cela même : sa multitude de saints et son idée obsessionnelle du sacrifice rejoignant l'animisme Jarai. Les esprits populaires sont le Roi du Feu (Po Teo Pui) et le Roi de l’Eau (Po Teo La), invoqués par le chaman pour influencer la météo.
Les JaRai ne pratiquent pas le culte des ancêtres. Par contre, les rites funéraires sont particulièrement complexes et onéreux. Pour eux (Et les Bahnar), la mort est le commencement d'une autre vie dans l'au-delà. L'âme du défunt se change en esprit, il vit désormais avec les ancêtres dans le village des esprits. Les esprits ayant besoin de nourriture et autres vêtements tout ce qu'il y a de plus terrestre, on enterre avec lui les objets nécessaires à son confort de l'autre côté. II n'est pas rare de voir des motos ou des TV sous la hutte qui protège la tombe, hutte qu'on appelle maison de l'esprit. Autour de la tombe sont placés des piliers en bois surmontés de sculptures brutes, dont certains représentent les gardiens spirituels et d'autres (très explicites), sont symboles de vie et de fécondité et aux 4 angles, des allégories de la tristesse. Une hutte-maison funéraire peut accueillir jusqu’à 30 défunts. Pendant quelques mois (mais cela peut durer des années si la famille ne peut se permettre financièrement la cérémonie finale), les vivants feront leur possible pour garder l'esprit auprès d'eux. C'est la période de l'entretient de la tombe, avec le nettoyage, l'entretient du foyer, apporter la nourriture, les offrandes… L'esprit du défunt est toujours présent, on peut encore communiquer avec lui. Ce n'est qu'après la couteuse cérémonie de l'abandon de la tombe que celui-ci rompra définitivement tout lien avec les vivants et deviendra "grand-père esprit" ou "grand-mère esprit" dans le monde des esprits. Cette cérémonie a en général lieu une fois l'an, à la fin de la saison des pluies et elle débute avec la pleine lune. Elle implique le sacrifice d'un buffle, de la musique de gongs accompagnée de danses et de (grande) consommation d'alcool de jarre ainsi que quantité de nourriture. C'est un des rituels les plus importants chez les JaRai.
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