Dans une ruelle ombragée de village, dans une rue piétonne de Hanoi ou sur le parvis d’une maison communale, le voyageur qui séjourne au Vietnam rencontrera certainement des gamins se livrer à des jeux étonnants, aux rythmes parfois de comptines entêtantes. Si beaucoup sont aujourd’hui perdus ou oubliés, d’autres refont surface dans ce monde moderne, avec un peu de nostalgie mais surtout beaucoup de bonheur.
Appelé également le jeu du casier mandarin, ce jeu populaire de stratégie peut se jouer à 2, 3 ou 4 participants. Le plateau de jeu est dessiné à même le sol : il consiste en 10 cases carrées de paysans (2 lignes superposées de 5 cases) et 2 cases demi-circulaires de mandarin (quan) aux deux extrémités ; les cases des paysans sont appelées dan. Chaque joueur dispose d'une série de 35 cailloux, dont 25 sont répartis sur 5 carrés paysans et 10 sont répartis sur les cases des mandarins. Ceux-ci sont d’ailleurs souvent remplacés par des pierres plus grosses. Pour gagner, le principe est simple, c'est à celui qui récupère le plus de cailloux. Mais plus facile à dire qu’à faire : |
Il répète cette opération avec la case qui suit celle où il a déposé le dernier caillou jusqu’à ce qu’il arrive à trouver une case vide pour récupérer tous les cailloux qui se trouvent dans la case qui suit la case vide. Si le premier joueur ne trouve pas de case vide précédant une case avec des cailloux ou s’il arrive sur une case devant un mandarin ou s’il atteint deux cases vides consécutives, alors la main passe. Si jamais toutes les cases d’un côté sont vides, son joueur doit débourser 5 cailloux qu’il replace dans les cases. S’il n’en a pas, l’autre joueur doit les lui prêter. La partie se termine uniquement lorsqu’il y a chute des mandarins, autrement dit quand leurs cases sont vides ou que toutes les cases du jeux sont vides. Les joueurs comptent alors leurs pierres, le gagnant étant celui qui en possede le plus.
Ce qui est très étonnant, c’est qu’il existe le même jeu en Afrique, sous le nom de Awalé.
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Ce jeu traditionnel de bâtonnets en bambou est particulièrement apprécié des fillettes. Choi Chuyen est souvent accompagné d’une comptine qui n’a absolument aucun sens : « Cai mot… Cai mai… Cai co… So mang… Thang chang… Con chit… Ngam nga… Ngam nguyt… Chuot chit… Sang ban doi… ». Principe du jeu : un tas de baguettes est disposé sur le sol et un joueur lance une balle en l’air. Le but consiste à récupérer une par une le plus de baguettes possibles avant de rattraper la balle. Pour cela, on doit transférer (chuyen) le paquet d’une main à l’autre autant de fois que possible avant de récupérer la balle dans le creux de ses paumes. On transfère d’abord une baguette, puis deux à la fois, puis trois etc. jusqu’à dix. En cas d’échec, le jouer passe la main à un autre joueur. |
Il s’agit d’un jeu de Colin Maillard à la mode vietnamienne. Il fait partie de la culture vietnamienne depuis des temps immémoriaux et garde une place très importante lors des fêtes de village. Il était autrefois pratiqué par des adultes pendant les festivités du printemps ou de la mi-automne, comme l’attestent plusieurs peintures Dong Ho.
Un volontaire parmi les joueurs a les yeux bandés et est placé au milieu d’un cercle formé par les autres, les « chèvres ». En chantonnant la comptine « Một bầy trẻ nhỏ Bịt mắt bắt dê », les chêvre courent, dansent et font un bruit… de chêvre pour troubler la concentration du chasseur aux yeux bandés. Quand la chanson se termine, tout le monde s’arrête de bouger et de crier. Le chasseur va essayer d’attraper ceux qui sont autour de lui et il doit deviner le nom de la chêvre attrapée. S’il dit exactement son nom, elle prend alors sa place et on lui bande les yeux. Sinon, le jeu continue.
Il existe plusieurs variantes de ce jeu dont celle avec 1 chasseur et 2 chêvre. Ils sont désignés par un tour de pierre-papier-ciseaux, les autres forment un cercle autour des 3 protagonistes. Une chêvre attrapée devient chasseur, qui retourne alors dans la « « clôture », un autre prenant sa place au centre du cercle.
Les historiens disent que Bit mat bat de n’est pas vietnamien d’origine, mais laissons les grands se prendre la tête et les enfants s’amuser !
Inscrit sur la liste des patrimoines immatériels de l’Unesco, le tir à la corde est un incontournable des fêtes villageoises au Vietnam. Les jeux de tir à la corde du Cambodge, de la République de Corée et des Philippines sont eux inscrit à l’UNESCO.
La règle jeu est toute simple et suit les mêmes principes que tout autre jeu de tir à la corde partout ailleurs dans le monde : deux équipes séparées par une ligne tracée au sol se font face. Une corde ou une perche d’une vingtaine de mètres avec un nœud au milieu est tirée par les équipes. Le gagnant est l’équipe qui réussit à avoir le nœud dans son territoire. Jeunes et moins jeunes sont chaudement invites à y participer, car jouer au tir à la corde ne donne pas seulement aux joueurs de l'excitation, du plaisir et de l'exercice. Cela crée également un esprit de cohésion collective et de communauté. C'est un sport hautement compétitif, au gameplay très simple et sûr pour tous les joueurs.
Datant du 13ème siècle et originaire de Chine, le jeu du volant à plume est probablement celui qui impressionne le plus le visiteur pendant son séjour au Vietnam : un peu comme au badminton, mais sans les raquettes, les joueurs se renvoient le volant avec les pieds et d’autres parties du corps mais n'ont pas le droit d'utiliser les bras et les mains. Le principe du jeu consiste à garder le volant en l’air le plus longtemps possible. Ce jeu d’adresse plus compliqué qu’il en a l’air peut se jouer dans la rue ou sur un terrain de badminton, à deux en face à face, ou à plusieurs en cercle. |
Très populaire au Pays du Dragon, Cu Tuong se joue un peu partout, sur les trottoirs, sur un banc… aussi bien par des hommes que des femmes, du plus jeune au plus âgé. Originaire de Chine où il prend le nom de Xiangqi, on le retrouve aussi au Japon sous le nom de kawanakajima shōgi. Il est possible que les deux jeux, le Xiang Qi et les échecs occidentaux se soient développés à partir du même jeu indien, le Chanturanga.
2 joueurs (Un rouge et un noir ou bleu) s’affrontent sur un plateau de 9 lignes de large sur 10 lignes de long. 16 pièces par joueur sont placées aux intersections des lignes et non sur les cases, contrairement au jeu occidental. Sur le plateau est également dessine une rivière qui est là pour limiter les mouvements de certaines pièces et y sont figurées également les positions des 2 palais. Si les pièces s’appellent ici général, chariots ou soldats (En lieu et place des rois, tours et pions), les règles sont à peu près les mêmes que celles des échecs occidentaux. Le but étant bien entendu d’utiliser les pièces pour mettre le général de l’adversaire en position d'échec et mat. Ce faisant, il faudra tenter de prendre autant de ses pièces que possible pour pouvoir effectuer un échec et mat plus facilement. Il est globalement plus facile de faire échec et mat dans cette version du fait des règles et déplacements de certaine pièces : par exemple, les canons peuvent capturer en passant par-dessus une pièce, les généraux ne peuvent pas se trouver directement l'un en face de l'autre…
Un jeu du loup, en version vietnamienne, populaire et très apprécié pendant les fêtes villageoises. Il nécessite entre 6 et 15 joueurs. Un des joueurs va jouer le rôle du médecin et les autres forment une queue dont la première personne est le dragon et les autres, à l’arrière, sont des serpents. A la queue leu leu, dragon et serpent viennent voir le médecin tout en chantonnant :
Où vas-tu, serpent-dragon ?
- Je cherche des médicaments pour mon fils.
- Quel âge a-t-il, votre fils ?
- Il a un an (le médecin ne bouge pas).
- Il a (deux, trois, quatre, cinq ... et ainsi de suite) ans. Le médecin ne bouge toujours pas.
Le dialogue continue jusqu'à ce que le serpent-dragon dise :
- Il a dix ans. Le médecin se lève alors et engage une conversation pendant laquelle il dira à la tête du dragon qu'il veut prendre la queue.
La tête de la ligne réagit aussitôt en étirant ses bras pour barrer la route au docteur pendant que le serpent-dragon essaie de faire un cercle. En fin de compte, si le serpent-dragon réussit à rouler en cercle avant que le médecin ne puisse toucher la queue, il gagne. Au contraire, si le médecin attrape la queue du serpent-dragon, tout le groupe perd la partie. En punition, les perdants doivent tendre les mains, paumes vers le bas, vers le vainqueur, qui les gifle les uns après les autres.
Bien entendu, ce top 7 est loin d’être exhaustif, manquent en particulier tous les jeux pratiqués dans les différentes communautés ethniques, mais il se veut un aperçu de l'incroyable diversité des jeux folkloriques au Vietnam. Alors que jeux vidéo, smartphones et autres tablettes ont la cote auprès de la plupart des jeunes, les jeux folkloriques perdent de plus en plus de leur attrait. Heureusement que des passionnés – en créant des clubs ou en organisant des évènements – participent à la sauvegarde de ce patrimoine unique ou relancent la mode de tel ou tel jeu, pour le plaisir des petits comme des grands.
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