Pâtés impériaux, nems, rouleaux de printemps… autant de termes pour designer – sans en être vraiment certain – la même chose. C’est une situation assez courante où, dès qu’il s’agit de « manger chinois », des images de rouleaux de galettes de riz fourrés voisinent avec un canard laqué et du riz parfumé. C’est en fait la première erreur que (presque) tout le monde fait : les nems ne sont pas d’origine chinoise, mais bel et bien vietnamienne. Cette info vous a mis l’eau à la bouche ? Suivez-nous dans cet article, vous allez vous régaler…
Dénommé nem rang dans le Nord du Vietnam, cha gio dans le Sud et cha ram dans le Centre, il prend parfois l’appellation de nem Sai Gon, cha cuon ou encore de cuan ram. Ailleurs, il est connu aussi bien sous les termes d’Egg Roll, Spring Roll ou Vietnamese roll. Et enfin, le nem est aussi connu en France sous le nom de pâté impérial. C’est ce dernier terme qui nous met sur la voie de son origine, car contrairement à tout ce qui peut se dire et se lire, le nem était tout d’abord présent sur les tables impériales du Vietnam. Il paraitrait que ce ne serait qu’une légende, mais force est de constater que des documents écrits datés de 1745 en font mention comme d’un plat servi lors des cérémonies à la cour des Nguyen.
Les versions anglo-saxonnes semblent faire référence à cette variété de nems préparés à base de pâte de blé et d’œuf, comme la pâte de raviolis won ton chinois, ce qui a induit pas mal d’erreurs et de confusions. Profitons-en pour noter toutes les différences existantes entre le Chunjuan chinois et le Nem vietnamien : on vient de le voir, la pâte est différente et les Chunjuan sont également plus grands, plus « bourratifs » que la version made in Vietnam. D’autre part, la garniture du rouleau chinois se compose de chou haché, de pousses de soja, d'oignons et autres ingrédients ; alors la version vietnamienne quant à elle présente également des légumes hachés, mais aussi des vermicelles, des champignons noirs et des tranches de porc. Autre différence, les nems vietnamiens sont toujours servis avec leur trempette – le nuoc cham, une saumure à base de poisson, typiquement vietnamienne – contrairement aux « egg rolls » chinois.
Au vu de ce qui vient d’être dit, tout irait pour le mieux dans le monde des nems et de leur origine s’il n’y avait ces deux légendes chinoises, qui, tout en reconnaissant que c’est grâce au Vietnam que le nem s’est aussi largement diffusé, en attribue la paternité au Pays du Milieu.
La première, peu connue – y compris des Chinois – nous ramène à la période dite des Printemps et des Automnes, soit entre 770 –476 avant J-C. Il y est fait mention d’une coutume voulant qu’on dépose 5 légumes et un peu de viande dans une assiette. Cette préparation se dégustait pour célébrer le début du printemps. La pâte ne viendra que bien plus tard. En fait, et là, l’histoire prend le pas sur la légende, sous les Tang (618 –907 avant J-C), apparait le Chunbing, considéré comme l’ancêtre du Chunjuan, une crêpe rectangulaire fourrée de toutes sortes de farces.
La deuxième légende, plus connue, met en scène un jeune candidat aux concours impériaux (Keju), natif de la province de Fuzhou. Comme tous les autres candidats, il révisait et préparait ses examens durement, en oubliant de manger et de dormir. Notre valeureux prétendant à un poste de fonctionnaire avait pour épouse une femme qui se désespérait de voir ainsi son mari se tuer à réviser, sans même avaler un grain de riz. Un jour, elle eut une illumination : « Et si je faisais une pâte de riz, toute fine, sur laquelle je poserais un peu de viande et quelques légumes ? Je la roulerais pour que ce soit facile à attraper et à mettre à la bouche, mon mari aura ainsi quelque chose dans le ventre pendant qu’il se remplit le cerveau ! ». Brave femme ! Dire que c’est ainsi que le nem serait né… Ici aussi, l’histoire prend le relais de la légende en montrant que c’est sous les Qin (1636-1911) que les chinois venant du Chaozhou exportent leur rouleau de galette de riz au Viêt-Nam, où il prendra le nom typiquement vietnamien de Nem.
S’il n’y avait que l’origine du nem qui soit compliquée ! Son appellation même peut signifier une préparation différente au dénominateur commun de nem :
Ici, on est sur une base de viande hachée et épicée, puis grillée au grill, traduction de « nuong ». Chaque région a sa variété de nem nuong.
La base est ici de la viande crue fermentée. On hache de la viande de porc, on la mélange à du riz grillé réduit en poudre et à des épices (ail et piment prédominent), le tout est roulé dans des feuilles de bananier et mis à fermenter au frais pendant 3 jours. Les feuilles associées au riz en poudre dégagent une sorte de levure qui permettra la fermentation de la viande.
Le principe ici et d’utiliser da la friture pour saisir les rouleaux farcis, faits de galette de riz très fine. Comme de bien entendu, chaque région (voire chaque famille !) a sa recette. Il existe d’ailleurs une version végétarienne. Le nem ran est indispensables aux fêtes familiales, notamment au moment du Nouvel An Lunaire.
La farce est essentiellement composée de légumes et d’herbes aromatiques, parfois avec des crevettes et des vermicelles. Les ingrédients peuvent au choix être crus ou cuits avant d’être roulés. La pâte est une galette dite en papier de riz. La trempette est traditionnellement à base de sauce chili mélangée à des arachides grillées broyées dans l'huile et de l'oignon séché.
Attention : ovni culinaire ! Le nem chao est à base de viande et de peau de porc bouillie émincée, de graisse bouillie coupée en dés, mélangé avec des épices et du riz grillé en poudre. Le tout est enroulé dans des feuilles de figuier. Nem chao s’apprécie avec des feuilles et des fruits comme les figues, les feuilles de girofle, les caramboles…
Nous mentionnerons pour terminer le Bo Bia, un rouleau de printemps venu de Thaïlande (connu là-bas sous le nom de popiah) mais né en Chine. De nombreux vendeurs ambulants proposent bo bia comme snack pour les écoliers. La farce fait entrer dans sa composition de la saucisse, de l'œuf, de la carotte, laitue, manioc, des crevettes séchées et des herbes. Le tout est émincé puis roulé dans une feuille de papier de riz un peu spéciale, difficile à trouver au Vietnam, mais facilement remplacée par la galette habituelle. Le Sud du Pays a sa version sucrée.
La base d’origine est une farce assaisonnée uniquement de sel et de poivre. La liste des ingrédients est simple, avec seulement 5 éléments principaux, quelles que soient les déclinaisons par la suite : de la viande et/ou des crevettes, des herbes, des vermicelles de riz ou de soja et bien sûr la galette de riz. Les carottes sont venues s’inviter à table pendant la colonisation française, par contre, les germes de soja entrent traditionnellement dans la composition authentique des nem ran. Ceci étant dit, si on recense toutes les variations de farce selon les régions et les galettes, on arrive au chiffre de 76 variétés de nems présentes sur les tables vietnamiennes !
Rencontrée sur les tables du Haut Tonkin, cette version est peut-être celle que les Français connaissent le mieux. Une fine galette de riz sert de support à de la viande de porc hachée, des germes de haricot mungo (les fameuses « pousses de soja »), des vermicelles de soja (transparentes), des champignons noirs (oreilles de chat) et des champignons parfumés, un œuf (idéalement de canard) et un oignon viennent tenir compagnie à tout ce beau monde. L’ensemble est finement haché et roulé dans la fine galette de riz. Les nem ran du Nord sont généralement plus longs que ceux présentés dans le Sud. On a pour habitude de les découper en tronçons avant de les servir.
La particularité des nems du Centre est leur forme : ici, les cuon ram sont plats, rectangulaires ou triangulaires. La farce est pratiquement identique à celle des nems du Nord, le navet prenant souvent place aux côtés des champignons. La galette peut également être au sésame (banh trang me).
Sous le nom de cha gio, les nems du Sud sont de petite taille, fourrés à la viande de porc et aux crevettes/crabe. Les légumes sont ici représentés par la chayotte et la patate douce, flanqués des inséparables champignons parfumés et des vermicelles transparents.
Les nems, c’est bon. Mais sans sauce… La seule et véritable trempette est composée d’un peu de sucre de canne, de sel, de jus de citron vert ou du vinaigre et surtout de la sauce de poisson nuoc-mam. Le tout est dilué à l’eau, puis selon la force recherchée, on ajoute poivre et piment.
Quelque soit votre Circuit au Vietnam, il sera absolument impossible de ne pas gouter à ce trésor culinaire !
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